(0)

La vie en Ariège au XIXe siècle

Livre numérique


Créée de toutes pièces à l’époque révolutionnaire, l’Ariège du XIXe siècle est diverse et pleine de contrastes : pays de plaine et de montagne, d’agriculture de survie et d’industries, de vallées enclavées et d’un grand axe transpyrénéen.

La vie quotidienne des Ariégeois est donc autant celle du paysan de la montagne « remontant » sans cesse la terre de ses terrasses et transportant fumier ou moisson à dos d’homme, du berger transhumant passant l’été dans les orrys d’altitude, que du métayer de la plaine ouvert aux progrès techniques, celle du mineur et du forgeur des hautes vallées comme celle de l’ouvrier des usines de Pamiers ou des tisserands du pays d’Olmes, celle du marchand urbain autant que celle du colporteur et du montreur d’ours… C’est aussi la vie d’un peuple de la frontière, familier du passage d’outre monts et de la rencontre de ceux qui viennent d’ailleurs, du bandit redouté comme du réfugié accueilli.

La vie des hommes, ce n’est pas seulement le geste du travail, c’est aussi l’environnement mental, un ensemble de mythes, de croyances, de comportements venu du fonds des âges, qui fait l’identité d’une communauté humaine. Les Ariégeois se singularisent par leur affirmation identitaire, par une forte cohésion vis-à-vis de l’extérieur, même si on se dispute entre soi, par une obstruction systématique à toute « agression » de l’État : conscription, règlements forestiers, impôt, douanes, qui prend plus souvent la forme de la contestation moqueuse que de la révolte…

L’univers multiséculaire qui avait assuré la survie d’une population nombreuse s’effondre au milieu du XIXe siècle. Suppression des droits d’usage, maladie de la pomme de terre, ruine des forges à la catalane incapables de faire évoluer leur technologie archaïque provoquent la misère des plus pauvres. Il en résulte des migrations temporaires puis une émigration définitive vers l’Amérique du sud et l’Algérie, puis vers l’Amérique du nord et le Sénégal et surtout vers les grandes villes du midi et vers Paris. Depuis 1846, c’est l’hémorragie démographique.

Tandis que l’Ariège traditionnelle voit ses équilibres s’effondrer, le monde extérieur arrive à sa porte. Le chemin de fer venu de Toulouse atteint Ax-les-Thermes en 1888 ; le tourisme et le thermalisme se développent et, même s’il n’est pas toujours bien accueilli, l’étranger fait rêver d’un ailleurs plus confortable. L’école obligatoire et laïque, ouvre des horizons nouveaux, fait disparaître « patois » et croyances anciennes, et inculque les principes de la République.